08 mars 2006

Pakistan 4 : Désert du Cholistan




Quand la vie nous prend tout notre temps

J’écris dans la cour, sur ce lit de corde qui me tient à l’écart des scorpions depuis presque un mois. Les gosses viennent, m’empruntent le stylo pour quelques tatouages maladroits, et repartent. Un âne passe. Une chèvre sort de ma chambre en crottant, un confetti de poème aux lèvres, c’était un poème pour une amie :
...
Et les éperviers, sur le bar des toits en rang d’oignons
Les bœufs à bosse préhistorique, lente, résignée
Et les dromadaires qui ruminent des anciennes étoiles
Si hauts, si pendus au ciel
Que les coussins de leurs pieds touchent à peine le sol
Tout est ton sur ton, surpeint de poussière
Ou alors sous un glacis d’or
Ciel cannelle, chacals, fennecs, scorpions
Serpents en habit de camaïeux crème
Points d’eau craquelés comme peau d’éléphant
Terre si basse que l’ombre des dromadaires fait la moitié du désert
Acacias achevant de coudre ciel et terre en points d’étoiles noirs
L’horizon n’est plus qu’une cicatrice de velours

Le monde est une sphère
Qui nous entoure
Où on se perd

Pakistan 3 : désert du Cholistan

Désert du Cholistan: des airs de dromadaire

On pense d’abord que tous les chameliers sont comme ces Rajasthanis indiens qui se contenteraient du prix de quelques thés pour vous emmener au vous désirez. Eh bien pas dans la partie pakistanaise du désert du Thar (nommée Cholistan, « patrie de ceux qui se meuvent » et donc enfin « Nomad’s land »). Non, car ici on a bien mieux à faire : dormir avant tout, dormir et suer un peu quand on en a la force. Alors j’étais finalement parti seul dans ce désert du Cholistan avec un dromadaire. Je savais qu’il se nommait Mafi et qu’en tirant sèchement sur les brides avec un raclement de gorge, il devait s’asseoire. Mais il n’a pas voulu, alors on a marché, longtemps… jusqu’à ce qu’un autre corsaire de ces vagues de sables veuille bien m’aborder et me guider chez lui.

Son village se nomme Derawar Fort, en raison des bastions qui avaient servi, des siècles durant, à protéger le royaume des Princes et des Nawabs. Mais il n’est plus dès lors que les chacals et les bandits qui hantent le désert. Les bandits, et la famille de Mohammed Shafik accrochée à sa mosquée plus encore qu’à son puits.