Iran 2: des montagnes du Zagros vers les dunes
Alors, d’une minorité à l’autre, on se retrouve à un coup de vent du golfe persique à faire naître des chevreaux pendant que la vieille Djéran fume le qalyan en attendant que cuise la soupe. Mère, grand-mère, arrière grand-mère ? Djéran n’a pas d’âge, tout comme sa tente de laine brune qu’elle rapièce en voyant venir la pluie, tout comme sa satanée tambouille, et comme cette tradition de quitter les montagnes du Zagros dès qu’éclot le premier chevreau – ce sens de la migration qu’avaient déjà les rois de Persépolis, il y a 2500 ans, cette culture de l’exode qui se perd lentement…
Même si le professeur ne vient plus à cheval depuis que la majeure partie de ses frères nomades s’est sédentarisée et si la famille de Djéran refuse encore les nouvelles tentes de toiles et les maisons de briques, elle a pourtant insisté pour m’emmener au mariage de ses cousins « trop civilisés ». Les hommes fument d’un côté, alors que les femmes dansent de l’autre. Puis c’est au tour des jeunes loups de jouter à coups de bâtons pour séduire les danseuses et, qui sait, en brisant assez de genoux, conquérir l’une d’entre elles, l’épouser l’hiver prochain et enfin pouvoir lui parler.
Trois jours de noces dans les nasillements du saz, les coups de bâtons ou de fusil, trois jours où Djéran retrouve une culture qu’elle croyait perdue.